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6 mai 2009 3 06 /05 /mai /2009 01:04


" Ne juge personne avant de te mettre à sa place.
Ce vieux proverbe rend tout jugement impossible, car nous ne jugeons quelqu'un justement que parce que nous ne pouvons pas nous mettre à sa place.
"
Emil Michel Cioran


Nous sommes, donc nous jugeons...
cela pourrait être aussi une autre maxime existentielle...
Le fait d'émettre une opinion peut toujours être entendu comme une prise de position et donc un jugement rendu.
Quelle est la frontière entre l'expression de sa propre pensée et le jugement ?...
Suivant les oreilles qui l'entendent, cette mise en mots de nos réflexions peut être prise pour jugement comptant... et content...

On s'accorde souvent à dire que l'on ne peut juger personne sans connaitre tous les tenants et les aboutissants d'une histoire, mais dans les faits, c'est très différent.
Bien que fidèle et fière partisane de cette défense du jugement hâtif, il me faut bien reconnaître qu'il m'arrive de juger sans savoir, et plus particulièrement quand je suis émotionnellement impliquée dans l'affaire...
Mea culpa bien sûr, mais un aveu de mal jugement peut-il effacer les conséquences parfois fâcheuses qui en découlent ?...

En regard qui se pose en miroir, je reçois le jugement des autres... comme tout le monde, sur mon univers et sur ma vie,
alors même que secrète par nature, je suis forcément objet de jugements qui ne peuvent prendre en compte que les éléments que je laisse transparaitre, réducteurs et parcellaires, faits de contradictions et d'incompréhension...
La question du jugement peut alors se poser différemment.
On ne peut pas s'empêcher de juger ni d'être jugé, mais on peut n'y accorder que très peu d'importance, et décider que le seul jugement valable, c'est le sien propre sur sa vie...
Que chacun agisse en son âme et conscience pour mener à terme sa vie, et laisse autrui libre de faire de même, sans chercher à influencer, à comprendre ce qui ne peut l'être que de l'intérieur, ni à croire qu'il possède une quelconque vérité de vie digne d'être transmise par ce biais-là...

Le mécanisme du jugement sert aussi à chacun d'entre nous, à se positionner dans sa vie propre en nous permettant d'imaginer ce que l'on pourrait faire dans des situations auxquelles nous ne sommes pas personnellement confrontés.
Le jugement quand il ne se veut pas moralisateur, peut être un champ ouvert vers d'autres possibilités de réflexion, et agrandir notre espace de vie à une universalité soudain tangible... Parce que, ce que l'on juge, ce sont toujours des comportements, des actions ou réactions... et on les juge parce qu'on s'imagine dans cette situation, avec notre histoire, nos représentations et nos idées reçues... c'est-à-dire de façon unique et singulière...

Si nous pouvions réellement nous mettre à la place de quelqu'un, nous n'aurions pas de jugement, mais seulement des réactions...
Nous ne pouvons pas reproduire dans nos cerveaux, le cadre de pensée et de ressenti de l'autre, nous ne pouvons penser que par ce que nous sommes... Et même avec des histoires qui se ressemblent, à quelques détails près, ce sont ces détails qui font toute notre différence...
Nous pouvons utiliser des mots qui se ressemblent, mais c'est toujours à nous qu'ils ressemblent ,plus qu'à des paroles universelles...
Nous avons tous en nous des mots qui nous ressemblent, et qui ne ressemblent qu'à nous...

Mais c'est avec les mots qui nous ressemblent, que nous pouvons dire aux autres, les paroles qui rassemblent...
parce que chacun dans notre bulle, nous vivons des destins similaires, dans lesquels nous évoluons comme nous le pouvons, à notre façon...
Notre point de rencontre avec l'autre se situe toujours sur la frontière commune de l'humanité...
Certains la gardent du haut de leurs miradors, mitraillette au point pointée sur tout ce qui ne pense pas comme eux, d'autres se contentent de surveiller la ligne de démarcation, veillant à ne pas se laisser envahir par des idées et préjugés qui viendraient d'ailleurs...
Les frontières... ce sont nos limites d'acceptation de l'invasion du monde extérieur sur notre terrain intime et personnel...

Le jugement n'est pas mauvais en soi, il n'est qu'esprit critique, propice à nous protéger d'adhésions irréfléchies à des points de vue extérieurs...
Mais gardons-nous des effets de mode et d'entrainement qui peuvent nous pousser à suivre le mouvement sans raisonnement...
...


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